14 novembre 2006

Des étudiants "gwenn ha du"

Tous les deux mois, la revue bretonne "Brud Nevez" publie un de mes articles au sujet de la Thaïlande. Ou plutôt, Maï en Thaïlande. Comme certaines personnes m'ont réclamé la traduction, je vais les mettre ici. Voici le dernier en date, publié dans le numéro 259.

En Thaïlande : des étudiants « gwenn ha du »1

Je vais bientôt terminer ma première année en Thaïlande. J’y suis maintenant très à l’aise, dans le pays en général comme dans mon travail. Pour ceux qui n’ont pas lu le début, je suis professeur de français à l’Université de l’Assomption à Bangkok.

Peu d’étudiants ont choisi le français. Environ 350 : certains l’étudient comme majeur, d’autres comme mineur, et certains débutants n’étudient avec nous qu’un semestre ou deux. Les classes sont petites, 10 ou 12 personnes en moyenne. Ce n’est pas pour me déplaire, c’est plus facile ainsi d’avoir de bonnes relations avec eux. Je connais le prénom de chacun d’eux. Ici on n’utilise pas les noms de famille, et heureusement, parce qu’ils sont très longs et que je ne pourrais pas m’en rappeler.

De temps en temps j’utilise également leur surnom. Par exemple – prenez votre souffle – Budsabamintra Charernthamanont sera simplement appelée Lek. Mon nom officiel est « Ajarn Maïwenn ». Ajarn signifie professeur. Pour l’administration et les autres professeurs je suis « Ajarn Maïwenn », rien d’autre. Mais pour les étudiants c’est un peu différent : « Ajarn Maïwenn » bien sûr ou « Ajarn », « Mademoiselle », « Miss », « Teacher » ou même seulement « Maïwenn ». Ce n’est pas très normal, ils n’utilisent pas uniquement le prénom des autres professeurs. Mais comme je suis farang et encore jeune, ce n’est pas grave.

De plus, il m’arrive de sortir avec eux. Mais ils me respectent tout de même, et c’est la chose la plus importante. Certains font le « wai » pour me dire bonjour ou quand je distribue des papiers. Ils apprennent ce geste avec leurs parents ou à l’école, quand ils sont tout petits.

Uniformes et nouvelles règles

Vous pouvez voir sur la photo que les étudiants portent l’uniforme. Il y en a deux. Tout d’abord, l’uniforme ordinaire : une chemise blanche et un pantalon foncé pour les garçons, un chemisier blanc avec l’insigne de l’université et une jupe sombre pour les filles. C’est drôle d’enseigner à des classes en « gwenn ha du » ! Et l’uniforme des grands jours, les examens par exemple : il faut porter des jupes et pantalons noirs, des chaussures de ville, la ceinture en cuir de l’université, et les garçons doivent avoir la cravate rouge de l’école.

Si on ne porte pas l’uniforme complet, on ne peut pas passer l’examen ! Quand je pense que j’ai passé mon bac en short, il faisait tellement chaud cette année-là. Quelles différences ! Les professeurs n’ont pas d’uniforme, mais il faut être poli. « Poli » ? Qu’est-ce que ça veut dire dans le domaine vestimentaire ? C’est un concept thaï : on dirait sans doute convenable en français. Par exemple, les femmes doivent porter une jupe (au début ce n’était pas facile pour moi, je n’avais pas l’habitude. Et c’était difficile de trouver des vêtements, parce que je suis plus grande et grosse que les Thaïes en général !)

Mais ne croyez pas que les règles soient très strictes. Au contraire, j’ai dû établir de nouvelles règles dans ma classe. Il y en a 4 :

- Ne pas arriver en retard

- Ne pas manger en classe

- Ne pas aller aux toilettes pendant la classe

- Ne pas utiliser de téléphone portable

Je suis sûre que vous vous dites : ben oui, c’est normal, non ? Normal pour vous, mais pas pour mes étudiants. Si leur téléphone sonne, les étudiants thaïs sortent de la classe pour répondre ! Mais personnellement je ne peux pas tolérer ça. J’ai donc dit à mes étudiants : puisque vous apprennez le français, nous allons suivre les règles françaises. Ca marche à peu près, mais c’est difficile d’avoir une salle pleine à 9h au début du cours. Cependant, ne croyez pas que c’est ainsi dans toutes les écoles thaïes. Dans le public c’est plus strict. Ici les étudiants viennent de familles riches, et parfois ils ne sont pas habitués à obéir aux règles, malheureusement…

Que pensent-ils de la France et du français ?

J’ai essayé de savoir ce que pensent mes étudiants de la France et du français. Première chose, leur avis n’est pas différent des autres francophones à travers le monde : pour eux, la France est un pays chic et romantique. Ils veulent y aller pour visiter la Tour Eiffel ou les châteaux de la Loire et acheter du parfum et des vêtements sur les Champs Elysées, comme Kamonphan. Pour Ekachai, le français est « la langue de l’amour ». Ils apprennent le français parce que c’est une belle langue, mais aussi parce que c’est utile, pour le tourisme par-exemple. Le projet de Sunanta est de travailler dans une chaîne hôtellière française, et donc c’est important de parler la langue. Selon Chawawut, beaucoup de Français viennent en Thaïlande pour faire du commerce. « Si je parle bien français, je serai mieux accepté par les clients » a-t-il dit. Un de mes anciens étudiants, Jirawut, travaille pour un avocat français. Il m’a confié : « Ceux qui abandonnent le français sont stupides, ils pourraient trouver du travail grâce à ça ». C’est toujours vrai, même si l’anglais est la langue internationale maintenant. Espérons qu’ils parleront tous français pendant de nombreuses années !


1 « Gwenn ha du » est le nom du drapeau breton. Ca signifie « blanc et noir », comme les uniformes des étudiants

5 commentaires:

Anonyme a dit…

mad , egiz e-barz Brud Nevez ! eun tamm bruderez 'vid al leor zo mad da gaoud. kendalhit gand ar veaj evid om blijadur .

Anonyme a dit…

A propos des règles en classe, pour info : en Allemagne par exemple, les élèves/étudiants se comportent exactement comme tes étudiants thaïs. Manger, aller aux toilettes, sortir de la salle est tout à fait normal en Allemagne.

Anonyme a dit…

on critique beaucoup le système éducatif en france , faut voir ailleurs peut être ( on peut toujours mieux faire certes ). A. M.

Anonyme a dit…

Ce n'est pas le système éducatif qu'il faut critiquer en France, ce sont les conditions de vie et de travail dans les établissements. Ici on peut encore enseigner en étant respecté et sans risquer de se voir agressé, c'est ce qu'on appelle un pays civilisé (à l'exception notable du sud musulman, où des profs se font parfois assassiner en pleine classe).

Anonyme a dit…

La Thailande et les etudiants thailandais sont tres attachants. Pour moi qui y ai vecu et travaille pendant 3 ans, je peux vous dire que c'est agreable d'avoir des etudiants agreables et gentils, aimables et polis, tout en restant respectueux. Rien a voir avec les etudiants europeens !